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Le processus du vivant comme référentiel "narcissique"

Le processus du vivant comme référentiel "narcissique"

Introduction au concept de narcissisme

Une interaction ne peut s'opérer sans, au moins, deux référentiels distincts. 
Un référentiel est un sujet qui participe à un système, définissant ce système depuis son point de vue singulier.
Une vérité change suivant son référentiel. C'est par son référentiel rendu persistant qu'un système est scientifiquement rendu logique. Il est scientifiquement impossible de réaliser une expérience scientifique sans définir au préalable le référentiel d'observation, afin d'interpréter un résultat en fonction de ce référentiel.
En ce qui nous concerne, il faudra donc spécifier si le référentiel d'un raisonnement est du point de vue de la pensée ou du vécu. Ces deux référentiels étant par essence complémentaires ils ne sauraient apporter les mêmes vérités.
Il semble évident que, dans mon soucis à élaborer un processus du vivant, mon ambition est de faire de ce processus un référentiel pour l'acteur. Je l'appelle donc tout naturellement le référentiel "narcissique", en opposition au référentiel de la pensée. Je préciserai plus tard l'importance de réinvestir le terme de "narcissique" et de le distinguer de la "perversion narcissique". Le narcissisme fait ici référence aux qualités vivantes d'un sujet, dans sa capacité à respecter un processus organique qui le fait être au monde. Je ne manquerai pas de proposer une lecture du mythe, pleine de bon sens et sans manichéisme.

Deux référentiels narcissiques

Dans une interaction théâtrale, il existes deux référentiels narcissiques. Deux sujets d'une interaction dans leurs capacités à être et manifester leurs vivants. Cette interaction crée un champ, c'est le champ dramatique, c'est l'histoire prenante, captivante et pleine de justesse.
Le référentiel narcissique est celui qui concerne l'acteur. C'est ce qu'il doit chercher à être et c'est cela qu'il doit acter s'il veut être en mesure de vivre des états incarnés. Il doit ainsi acter sa présence et la confier à son contexte, son système, pour l'habiter justement et légitimement, sans autre préoccupation.

Si l'acteur cherche à maîtriser la nature de sa relation par la pensée, par l'idée, il prend le rôle du champ dramatique et finit par acter autre chose que lui-même. Il devient tyrannique, et son personnage quitte son ancrage organique pour n'être plus qu'une idée, c'est à dire un propos politique plus que poétique. Ce propos, cette idée, appartient à l'acteur et non à son personnage. Il devient alors un outil plus proche de la propagande que de la proposition poétique. C'est ainsi, en forçant le jeu, qu'il sort de son champ de compétences, et qu'il échappera manifestement à la beauté lyrique, nécessaire à l'apparition de la beauté, seule vérité au dessus des lois humaines.
C'est cette simple idée de référentiel qui différencie la création poétique de la représentation politisée. Il est erroné de dire que tout est politique. Tout est politisable, peut-être, mais parfois la création n'est seulement que poésie, et son pouvoir artistique est ainsi décuplé car ce que la poésie finit par représenter est plus grand que l'humanité qui l'a fait naître. L'idée politique doit rester la propriété sociale, celle du public.
Je crois que la politisation de l'art devrait pouvoir rester un choix démocratique, un choix pour chacun des éléments du public. Je crois que la représentation artistique devrait rester avant tout un objet mystique, sans la figure religieuse, dans la grande question mouvante de l'être.
Pour rester dans l'exercice du vivant et le représenter sans anthropocentrisme, l'acteur doit se concentrer sur son référentiel "narcissique" pour que la dramaturgie puisse permettre la trouvaille poétique. 



Deux référentiels qui doivent nécessairement
Acter ma présence, c'est devenir un référentiel pour être en mesure d'interagir. Acter ma présence en tant qu'objet me permet de me considérer dans un contexte, mais cela ne suffit pas à acter ma présence dans mon pouvoir à générer des traces, dans mon pouvoir à participer à l'économie d'un monde commun. 
Acter, c'est faire valoir sa capacité à générer des traces dans le visible et dans l'invisible. Acter, c'est manifester son être dans l'exercice de son vivant. Acter, c'est être en mesure de se laisser affecter pour générer une réaction particulière, propre à une expérience et une condition, propre à une sensibilité, un tempérament. 
Cette particularité, cette singularité, c'est cette faculté à m'identifier au processus qui m'est propre par mon expérience, mais commun dans la régie du monde. 

Me laisser affecter par chaque manifestation de mon processus universel c'est
Le seul moyen d'être
Dans la justesse de ma condition, c'est 
Le seul moyen qui m'est permis pour
Être en mesure d'acter une beauté dont
L'incarnation validera
Une vérité inconditionnelle et mouvante, au 
Delà des lois humaines,
Et dans le jugement 
Des nécessités mystiques et concrètes.