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Représenter le vivant, une intention artistique

Sorti de la pensée objectale. je découvre un monde en mouvement où
L’art est une activité humainediscipline qui crée des représentations du monde pour le rendre intelligible.
Toute amélioration de cette définition radicale ne peut être que commentaire accessoire.

Cette définition offre une simplicité qui peut rendre sceptique, mais elle est assez radicale pour permettre à mon esprit de concevoir chaque évènement conscient comme un évènement artistique, comme étant l’image d’une autre chose.

Représenter c’est casser une illusion. Une idée de notre connaissance qui n’aurait jamais été remise en question vient, par le biais d’une œuvre d’art, de changer de forme, de figure, de substance et de réflexion. Une alternative insoupçonnée vient d’être offerte dans la beauté d’un sens qui nous dépasse. C’est le pouvoir de l’art sur l’individu et sa confrontation au monde. Ce n’est pas tant l’alternative qui vient éblouir le spectateur de l’œuvre, mais le sentiment qu’une chose immuable a été atteinte, et modifiée. Cette idée d’offrir au convenu une annihilation essentielle, ouvre à l’esprit et au corps une inspiration extrêmement vivifiante, un soulagement ontologique libérateur. C’est ce sentiment qui, en devenant pour certain une nécessité, fait les poètes.

L’art a donc un mouvement, et une fonction. Il connaît plusieurs acteurs dans le processus de son mouvement, plusieurs schèmes anthropomorphiques : Le poète, l’artiste, l’artisan, le politique. Le poète trouve, l’artiste représente, l’artisan diffuse et le politique interprète pour négocier les utopies du poète. Je n’écris cela que pour donner un sens à l’art, sans quoi il serait impossible de le penser. L’artisan peut tout à fait être également l’artiste et le poète de son ouvrage, il n’est pas ici question d’identité mais d’états d’esprits dans un processus artistique.

La poésie cherche à trouver, sans savoir quoi ni où, elle cherche jusqu’à l’apparition d’une beauté, d’une évidence. Le poète alors lui donne une forme pensée, que l’artiste, dans sa technique portera dans une forme idéale et universellement intelligible. L’artisan portera le concret dans l’utile et assurera sa diffusion vers le commun. Le politique agencera les utopies mises en mouvement.

En créant une image artistique, l’artiste imprime une mémoire qui devient alors le mouvement d’une utopie. L’utopie, c’est la trace du futur dans le souvenir. Tout ce qui commence, ou a commencé à exister, vient interagir et vient occuper l’espace ou le temps pour participer au futur, à l’avenir. Une seule chose peut entraver la fatalité : une autre fatalité.

Représenter le vivant est un enjeu artistique permanent et radical. Le vivant habite tout ce qui est précieux dans l’histoire comme dans l’avenir, tout ce qui est précieux au présent. Le vivant est précieux dans tous les domaines, toutes les dimensions ou l’être humain s’émancipe. Le vivant est comme un champ qui donne son mouvement à tout ce que nous sommes et tout ce qui nous émerveille depuis la nuit des temps. Il est une furieuse obsession pour chacun de ses représentants. Représenter le vivant, c’est s’abandonner dans ses traces inconscientes pour tenter de le voir toujours plus justement. C’est le principe de la divination. C’est donc lui donner une intention plutôt qu’une forme. La forme doit apparaître malgré soi pour être indiscutablement juste.. Tout ne doit être que mouvement et souvenir, trace, impression, et la forme ne doit être constaté que dans le vif, vécue et jamais pensée. Elle doit rester une mémoire surréaliste, invisible, omniprésente, hors du langage pour être à sa bonne place, pour rester une jubilation, une veille, une nature mouvante et polymorphique. Le polymorphisme est la seule forme acceptable pour le vivant.

Nous essaierons autant que possible de fuir les natures finies, de former des contours pour enfermer les essences dans des objets, et de figer les mouvements dans des origines ou des conséquences. Pour le théâtre, nous supprimerons donc toute convention, tous les codes superflus, pour ne garder que le respect que de trois theatrons, et d’une théâtralité, qui ne sera rien d’autre qu’une science des interactions.